L’obligation morale du père à l’accouchement

En réfléchissant avec Futur Papa aux peurs que nous avons chacun par rapport à l’accouchement, je me suis rendue compte qu’il n’était peut-être pas si naturel que cela pour un homme d’assister à cette scène.

Quand on y pense, il y a une centaine d’années, les Futurs Mamans vivaient leurs accouchement entourées d’autres femmes et éventuellement d’un médecin. Mais il n’était pas courant qu’un autre homme soit présent. Le savoir se transmettait d’ailleurs de mère en fille, de femme à femme.

Qu’est-ce qui a donc changé? Qu’est-ce qui fait qu’aujourd’hui bon nombre d’hommes assistent à l’accouchement, ne fut-ce qu’en tenant la main de leur bien-aimée? Jusqu’à présent, je trouvais cela normal. Je me disais que c’était une manière de soutenir la future maman, d’assumer leur paternité, de montrer qu’ils prennent leur rôle de père au sérieux, que s’occuper d’un enfant n’incombe pas uniquement à la mère.

Et pourtant, aujourd’hui je doute du bien-fondé de cette croyance. Or la grossesse bouscule déjà un peu le regard qu’un homme pose sur sa femme enceinte. On n’est plus seulement une femme, on devient aussi une mère. Il y a donc des chances pour que ce regard soit renforcé en assistant à l’accouchement. Après un tel événement, à quel point est-on encore considérée comme une femme à part entière? L’homme peut-il encore nous voir comme une amante après cela? Car au fond, c’est bien de cela qu’il s’agit.

Bien que Futur Papa essaie de me rassurer à ce sujet, il ne peut néanmoins s’empêcher de me dire qu’il ressent malgré tout comme une attente qu’à la société envers les pères d’être présent à l’accouchement. Dans son cas, il a envie d’être présent et ne le vit donc pas comme une obligation, mais quand même me dit-il, on est passé des pères « absents, attendant de l’autre côté de la porte » aux pères « présents sous peine d’être mal vus »… N’est-on pas passé d’un extrême à l’autre? Peut-être y a-t-il là aussi quelque chose d’un peu trop excessif? Et si on laissait vraiment le choix aux pères?

La première question qui pourrait surgir est « la future maman devrait alors supporter cette épreuve toute seule avec le corps médical? ». En fait, pas forcément. Il existe de plus en plus d’alternative, et c’est typiquement vers cela que nous nous sommes dirigés: une doula ou une sage-femme indépendante est je pense une très chouette manière d’être entourée le jour de l’accouchement. C’est une personne de confiance qu’on choisit pendant la grossesse, qui a de nombreuses connaissances et de réelles compétences pour aider la maman à vivre cette épreuve, avec qui on a préparé cet événement depuis plusieurs semaines voire plusieurs mois, qui nous a expliqué les diverses étapes du travail et les protocoles hospitaliers, qui sera là au moment de l’accouchement pour nous soutenir psychologiquement ainsi que pour nous suggérer l’une ou l’autre position / massage afin de soulager nos douleurs. C’est une femme qui en a accompagné des dizaines d’autres avant nous et qui a cette connaissance que partageaient d’antan les « femmes-accoucheuses » des villages. Une femme aussi qui, dans notre cas, pourra relayer Futur Papa quand il aura besoin d’aller prendre l’air, au vu des longues heures de travail qui nous attendent. Et ce, sans pour autant me laisser seule et sans soutien. Une manière pour nous de pouvoir confier nos craintes à quelqu’un de compétent, qui ne soit pas une blouse blanche (lesquelles ont généralement plusieurs salles d’accouchement à surveiller en même temps). Une manière de cheminer vers la parentalité depuis plusieurs mois et en toute confiance, et de se sentir soutenus tout au long de cet apprentissage.